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LES PORTES DE L’EXIL
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S’OUVRENT À BLAGNAC
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à Zouheir
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Qu’est-ce qu’un aéroport
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Sinon une fourmilière
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de sueurs humaines adossées
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Sur des latitudes incertaines
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Homme que voici
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Chargé de valises
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de confiseries déconfites
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de caprices démodés
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Tu possèdes un visage
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Soumis aux simagrées
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du miroir
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Peux-tu prouver
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aux professionnels du Makache, comme dirait Rimbaud.
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Les vigiles des frontières
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aux lointains ancêtres
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qui eurent affaire à Ibn Batouta
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À Rimbaud,
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à Essenrine
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à Yacine
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De quelle patrie
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tiens tu ton destin
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Dans un passeport
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aussi vert que le printemps
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qui vire à présent au noir
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Qu’est-ce qu’un aéroport
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Sinon un commerce de l’absence
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une maison close puant de nostalgies
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où tu croises ta propre image
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dans un dédale de souvenirs.
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Ici s’entrelacent les mémoires blessées
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rompues
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recousues à coup de tabac
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et d’alcool
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Zoheir vole vers sa mère
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Hippone n’attend plus rien
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des remèdes de Saint-Augustin
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Dans une lourde valise,
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Minuit consommé,
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le larron range ses souvenirs
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dans des boîtes de conserve.
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Zoheir est sur la liste d’attente
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Ô mon pays de longue patience
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livré aux arracheurs de dents
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reconvertis dans l’informatique.
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Qu’est-ce qu’un aéroport
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sinon de longs couloirs
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où l’on conjure l’oubli
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où l’on se reconstruit
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une patrie entre waters
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et vacuité.
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Zouheir ne vole pas
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immoler Ismaël
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Les couteaux blancs de la supercherie
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ont tranché tant de cous inconformes
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Que les rosaires des mères
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en ont perdu leurs grains
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Ami pendant que tu voles
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vers le soleil corrompu
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je parcours les quais
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de l’aéroport de mes insomnies
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j’y ai croisé Godard
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toujours interdit d’écran
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pour son soldat perdu
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À Blagnac on sert
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des liqueurs blanches anesthésiantes
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de la même pâleur
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de ma Capitale que je
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ne nomme plus que par
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Anna Gréki, fourvoyée, foudroyée
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par la blancheur de l’espérance trahie.
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Qu’est-ce qu’un aéroport
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Sinon une fourmilière
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de sueurs humaines adossées
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Aéroport de Blagnac
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le 20 avril 1996
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Poème extrait de “LE NOEUD DE GARONNE” ( Ed.AUTRES TEMPS,Marseille 1999)
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